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Catégorie : Prix du financier 2011
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Le Prix du Financier de l’Andese a été créé en 1984 par l’ANDESE. Il est organisé par Investir - Groupe les Echos depuis 1990 en partenariat cette année avec Korn Ferry International et Meeschaert Family Office.
Ce Prix distingue la personnalité ayant le plus contribué au développement de l’activité financière en France.
Cinq nominés sont choisis par le comité de sélection et soumis au vote de la communauté financière française.
Pour l’année 2011, M. Augustin de Romanet a été désigné comme lauréat du Prix du Financier pour son action en tant que Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations. Le Prix du Financier lui a été remis par M. François Baroin, Ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie
Le lauréat a bien voulu nous autoriser à reproduire son discours prononcé au cercle Interallié et nous l’en remercions.

Allocution de M. Augustin de Romanet,
Directeur général de la Caisse des Dépôts,
30 janvier 2012

Monsieur le Ministre,
Mesdames, Messieurs,
Cher Daniel Bretonès,
et Cher Bernard Camblain,


C'est un grand plaisir de recevoir ce prix de vos mains, Monsieur le Ministre, et je tiens à remercier ses organisateurs - l'ANDESE, l'association nationale des docteurs ès sciences économiques et en sciences de gestion et le journal Investir -ainsi que leurs partenaires, le cabinet Korn Ferry international et Meeschaert Family Office.

Je vais être bref et vous parler de quatre points : la Caisse des dépôts, les hommes et la finance, le long terme, la gouvernance.

I- Un honneur pour le groupe Caisse des dépôts

Mais c'est surtout un honneur pour tout le groupe Caisse des dépôts. Je veux saluer Philippe Lagayette, Daniel Lebègue et Jacques Delmas-Marsalet.
Je me souviens de l'époque ou quel que soit le DG il eut été impensable de lui attribuer ce prix tant la légitimité même de la CDC était mise en cause.
Souvenez-vous de la fin des années quatre-vingt-dix où l'on reprochait à la CDC d'abuser de son statut public pour faire concurrence aux marchés, dans le brokerage ou les métiers de la banque d'investissement par exemple.
Or je crois en effet que la CDC ne doit pas entraver ni fausser le jeu du marché. Elle doit respecter les règles du jeu et c'est une exigence à laquelle j'ai toujours veillé.
CDC est un animal étrange. Janus public/privé, elle doit inspirer confiance. Or la confiance, c'est la possibilité de faire une hypothèse sur la prévisibilité d'un comportement futur.
C'est la raison pour laquelle j'ai voulu tout de suite écrire un plan stratégique et rédiger ce que l'on a appelé un peu pompeusement des « doctrines ». Personne ne devait douter des motivations de son action.
Plus généralement, nous nous efforçons d'être lisibles dans nos interventions d'où la rédaction, la publication d'un guide de vote et la publication d'une charte de l'investisseur responsable.
Nos relations avec Bercy se sont singulièrement améliorées. C'est sans doute pour cela qu'on lui a confié la création du FSI (20 milliards) et du programme d'investissements d'avenir (7,5 milliards).

II- Les Hommes

Comme toutes les autres activités, la finance se fait avec des femmes et des hommes. Comme le dit cette citation du Général de Gaulle reprise sur la page Facebook de François Baroin : « les grandes choses se font par la valeur des hommes plus que par les textes ».

-    Hommage aux équipes financières et juridiques de la Caisse des dépôts qui sont d'un grand professionnalisme ;
-    Souci de les valoriser et de faire croître ce potentiel : première décision à la Caisse des dépôts : créer une DRH ;
-    Volonté de développer l'actionnariat salarié. Expérience d'EGIS, groupe d'ingénierie non coté de 10 000 personnes possédé à 100 % par la CDC. Ouverture du capital début 2011. Les salariés ont apporté 25 millions d'euros. J'ai accepté un prix déconnecté des « comparables » mais sur l'actif net pour rendre cela attractif. Le sacrifice financier immédiat sera largement compensé par évolution état d'esprit de l'entreprise.
-    Heureux d'être entré au capital du très beau groupe La Poste et de rejoindre le très beau projet de JP Bailly d'ouvrir le capital aux salariés. Cela sera notamment possible parce que nous avons milité pour une valeur d'entrée « raisonnable », ce dont chacun se félicite aujourd'hui car cela rend possible sur des bases comparables, avec décote, l'entrée des postiers au capital de La Poste. Après Egis, qui est aujourd'hui la plus belle expérience d'actionnariat salarié dans le secteur public, j'espère que La Poste va lui ravir la palme.
Mais aussi le développement de la place de Paris et de ses équipes financières.

-    le Fonds « émergence » a été créé la semaine dernière avec le soutien de Paris Europlace. II regroupe autour de la CDC, principal investisseur, et de la CNP, plusieurs institutionnels français pour investir dans des fonds gérés par de jeunes sociétés de gestion. Doté dès ce premier « closing » de 120 M€, ce fonds va sélectionner des sociétés de gestion nouvelles (de moins de 3 ans), entrepreneuriales (détenues majoritairement par les personnes qui y travaillent), établies en France, innovantes et performantes. Il s'agit de les aider à franchir les premières étapes de leur développement, qui sont souvent les plus difficiles. La place de Paris a besoin d'une industrie de la gestion financière dynamique, diversifiée, innovante ;
-    les initiatives destinées à favoriser la cotation des PME menées avec Alternext et l'AMF ;
-    l'installation à Paris des deux fonds créés par les membres du Club des investisseurs de long terme, créé en 2009, Marguerite et Inframed appelés à gérer plus de deux milliards d'euros dans les infrastructures ;
-    le programme France Investissement aide de son côté de nombreuses équipes de private equity à financer les PME et les ETI.

III- Investisseur de long terme

Cette identité d'investisseur de long terme n'a rien d'une marque.

-    Elle est une réalité qui se mesure aujourd'hui à notre utilité au service du pays en faveur du logement (515 000 logements sociaux financés avec le livret A depuis 2007), des PME (avec notamment le FSI dont nous sommes coactionnaires aux côtés de l'Etat et qui en 3 ans a déjà investi plus de 4 Md€ dans 1 700 entreprises), des universités et de l'économie de la connaissance (150 M€ d'investissement dans les universités et le fonds France Brevet), et du développement durable (avec par exemple 100 000 logements sociaux réhabilités et 677 MW de production d'énergies renouvelables en portefeuille).
-    Elle se mesure à notre horizon de détention des actions, particulièrement long puisqu'il s'établit à 7 ans là où elle est en moyenne de moins de 7 mois sur les marchés. La Caisse des Dépôts est un important investisseur en actions françaises et nous entendons conserver cette politique d'investissement stable dans des entreprises cotées, alors que beaucoup d'institutionnels se voient malheureusement contraints de réduire leurs portefeuilles d'actions.
-    Elle se mesure aussi par notre politique d'investissement socialement responsable qui s'est également vue récompensée ces dernières semaines, puisque la Caisse des Dépôts a fini en tête du classement établi par Vigeo pour sa notation extra-financière, devant 56 banques européennes...
La Caisse des Dépôts est un actionnaire actif qui interroge régulièrement les sociétés dans lesquelles elle investit sur leurs pratiques et leurs responsabilités en matière sociale et en matière d'environnement. Et ce dialogue porte ses fruits.

Dans plusieurs cas, il a conduit des sociétés cotées à modifier, avant de les présenter en assemblée générale, leurs projets de résolutions.

Lobbying : assises du long terme.

IV- Efforts sur la gouvernance

Rien n'aurait été possible sans une gouvernance irréprochable et l'instauration d'une coopération plus institutionnelle avec la commission de surveillance. La collégialité autorise l'audace. Si la Caisse des Dépôts a pu se mobiliser autant en mettant ses ressources, c'est parce que je n'ai jamais pris une décision seul, à l'ombre d'un bureau. Toutes les grandes décisions ont été soumises à l'examen vigilant du comité des investissements, dont j'avais appelé de mes vœux la création, et de notre Commission de Surveillance. Chacune d'elle a été pesée, expliquée, documentée.

L'institution CDC est une illustration de ce que la France sait faire de mieux. Aujourd'hui, avec son activité internationale, elle s'efforce d’aider la France à apprivoiser la mondialisation. Merci à tous de l'avoir compris.